Un potluck, sur papier, c’est simple. Chacun apporte quelque chose, on partage, on mange, on rit. En réalité, un potluck, c’est surtout une étude sociologique déguisée en repas collectif. Parce qu’il y a toujours les mêmes types d’amis qui se présentent… et on les connaît tous.
Il y a d’abord l’hôte. Celui ou celle qui dit que “c’est relax”, mais qui a quand même passé la veille à laver le frigo, replacer les coussins et cuisiner trois plats “au cas où”. Officiellement, il ne devait rien faire. Officieusement, il nourrit la moitié du monde.
Ensuite arrive le radin. Lui, il a parfaitement compris le concept… à sa façon. Il apporte quelque chose, oui, mais juste assez pour dire qu’il a contribué. Un sac de chips déjà ouvert. Une bouteille de liqueur marque maison. Et bizarrement, c’est souvent lui qu’on retrouve à se servir une deuxième assiette bien remplie.
Le snob, lui, arrive avec un plat qui vient clairement d’une place trop fancy pour le contexte. Il explique d’où vient l’ingrédient, comment c’est préparé, et pourquoi “normalement, ça se mange tiède, mais bon…”. Personne n’ose trop y toucher, mais tout le monde acquiesce poliment.
Il y a aussi le dernière minute. Celui qui texte à 16 h 42 pour dire : “J’apporte quelque chose !” et qui arrive finalement avec un dessert acheté sur le chemin. On reconnaît encore l’étiquette de prix. Il s’excuse beaucoup. On lui dit que c’est correct. On sait tous que ça arrive chaque fois.
Le semi-généreux, lui, apporte un plat correct… mais clairement insuffisant pour le nombre de personnes. Une lasagne pour douze, coupée en seize. Il est sincère. Il a juste mal estimé la faim collective.
Impossible d’oublier le négligé. Celui qui mange sans gluten...
Et il y a toujours quelqu’un qui croit encore, sincèrement, que la salade de pâtes, c’est chill. Avec des cubes de fromage orange, des olives en canne et une vinaigrette sucrée. Il est fier. Il dit que “tout le monde aime ça”. Et étrangement… il n’a pas complètement tort.
Le profiteux, lui, ne se cache même pas. Il arrive les mains vides, mais avec un appétit impressionnant. Il connaît l’ordre stratégique des plats. Il sait quand se resservir. Et il repart toujours avec un Tupperware “pour plus tard”.
Puis arrive le top chef. Celui qui a clairement vu le potluck comme une compétition. Présentation impeccable. Plat chaud. Garniture. Explication détaillée. On sent qu’il espère secrètement une ovation. Et souvent, il l’a.
L’épicurien weird, lui, amène quelque chose d’inclassable. Fermenté. Vegan. Sans gluten, sans sucre, sans plaisir apparent. Il explique que c’est “une expérience”. On goûte par politesse. On n’est pas certains d’aimer, mais on respecte l’audace.
Et finalement, il y a l’ami de l’ami. Celui qu’on n’a jamais vu avant, mais qui est déjà trop à l’aise. Il ne sait pas trop ce qu’il a apporté, ni à qui, mais il s’intègre rapidement. À la fin de la soirée, on l’aime bien. On ne se souvient juste plus de son nom.
Au fond, un potluck, ce n’est pas tant une question de bouffe. C’est une collection de personnalités, de petites manies et de situations qu’on vit tous, année après année. Et malgré le chaos, les plats douteux et les portions mal calculées, on recommence toujours.
Parce qu’un potluck réussi, ce n’est pas quand tout est parfait.
C’est quand on a de quoi rire… entre deux bouchées.
